Le Poney-club [2]
Pour ma première reprise, j'ai monté Artaban.
Comme c'était le premier poney que j'ai connu, véritablement, le premier que j'ai pansé, le premier avec lequel j'ai tenté d'être une cavalière et non une simple passagère, il devenu en toute logique mon "poney préféré." Je me rends compte aujourd'hui que j'aurais pu vouer le même culte à un autre, pourvu qu'il ait été le premier. Mais en bonne enfant romanesque, je le trouvais paré de toutes les qualités: il n'était pas mon favori parce qu'il était le premier, il avait été le premier parce qu'il était destiné à être mon favori. Toute illusion mise à part, c'était un bon maître d'école qui a eu le tact de ne pas décourager ma vocation naissante.
J'ai reçu mes deux premiers cours avec un groupe d'enfants plus jeunes que moi, parce que je commençais en cours d'année, et j'ai rejoint la reprise que fréquentait mon amie au troisième. Je n'étais pas spécialement douée, et je ne le suis pas plus aujourd'hui, mais je n'ai jamais eu peur à cheval. C'est un atout précieux pour avancer, ça compensait un peu mon retard.
Nous montions toujours dehors, dans la petite carrière pour faire de la mise en selle et du saut, ou dans les bois tout proche pour nous promener. En été quand il faisait beau, nous descendions jusqu'à la plage pour nous baigner avec les poneys. Pour le carnaval de la ville, nous défilions avec nos montures, déguisées elles aussi.
C'était un tout petit club, la monitrice n'était pas toujours là, mais j'y ai appris beaucoup. Il fallait aller chercher les poneys au pré, les soigner, les nourrir. Interdiction d'amener au travail une monture mal brossée, sous peine d'être renvoyé à l'écurie.
Après quelques temps, je connaissais tous les petits chevaux qui travaillaient là bas.